Cette
page est à jour le 22 Mai 2013 à 17h30. Il y a beaucoup à dire sur cet étrange, stupide et terrible évènement. C'est dire qu'il a sa place à bord de "
Marine Inconnue". Vous trouverez à mon bord sur ce triste sujet des informations généralement fort peu accessibles aux "
mal connaisseurs" de la navigation maritime commerciale, complétées par quelques
commentaires de navigateurs. Les "
Gens de Mer" ont fatalement un point de vue
"éclairé" sur la question. Ah!
S'il n'y avait
que ça à faire... D'autre part je suis désolé, étant actuellement situé "
dans la pampa", des soucis de connexion aussi ont su me retarder.
- Le
cul du Jolly Nero a à peine souffert de l’accident. Qu’est-il donc
arrivé à la télécommande des MP pour qu’il devienne soudain
incontrôlable?
Au-delà
des émotions fortes et de ma Compassion pour les victimes et leurs
proches, il m'a semblé utile de souligner tout ce qui est significatif dans
cet évènement à la fois stupide, fortuit et horrible. Il a su soulever l'émotion bien au-delà de la Communauté Maritime Italienne, à commencer par en France bien sûr, où les commentaires sont nombreux.
L'inimaginable avant ce soir là est arrivé...
En résumé des faits, le 8 Mai dernier en fin de soirée, un porte-conteneurs "
de bonne taille" était en train d'appareiller. Venant de quitter son poste à quai, il se dirigeait vers la sortie du port en marche arrière. Pour y avoir aussi escalé, je connais les lieux et le genre de manoeuvre qui fut exécutée ce soir-là. Je confirme donc qu'il n'y avait là absolument rien d'exceptionnel. D'autre part la météo était particulièrement clémente. Arrivé au niveau de la tour de contrôle d'où les officiers de port ont la jolie vue nécessaire à leur Travail, pour le Jolly Nero comme pour tous les autres en venant du même poste à quai, il ne restait plus qu'à exécuter "
une sorte de pas de danse", pour mettre son nez en direction de la sortie. Etant accompagné de deux remorqueurs, pour sortir il se rapprochait de la tour, toujours
en marche arrière, puis tout simplement en lançant sa machine en avant, il allait prendre la direction de la sortie en faisant route normalement.
Le Port de Gênes et le site du désastre vu par Google Earth
Quand il fut évident que la machine du Jolly Nero
ne pouvait plus "
être lancée en avant", l'évènement terrible est devenu inévitable car tout cela est arrivé très vite, sans que les deux remorqueurs aient le temps même d'essayer de le retenir. En effet un porte-conteneur comme le Jolly Nero et son chargement, sont avant tout un "
tas de tôles", de plusieurs dizaines de milliers de tonnes, avec tout
l'effet d'inertie que n'imagine peut-être pas, quiconque n'a jamais navigué.
S'ils avaient disposé d'
un peu plus d'espace et de temps pour manoeuvrer, peut-être les remorqueurs auraient-ils pu empêcher cela en poussant le Jolly Nero par le cul, mais au risque de se faire écraser entre le quai et la lourde coque. Hum-hum...
Qu’est-il arrivé à la télécommande de ses Moteurs de Propulsion pour que ce navire devienne soudain incontrôlable et aille "
tout casser avec son gros cul"?
D'autre part, heurter un quai avec un peu trop de brutalité est un petit évènement relativement fréquent dans la vie des marins. La perfection n'est pas dans l'humanité et il peut toujours arriver à un Pilote Portuaire et/ou au Commandant, de "
se laisser emporter" un peu plus vite que prévu. A la faveur
(si j'ose dire) d'une météo difficile, de la fatigue des uns ou des autres, d'un malentendu de langue ou d'une panne technique à votre bord ou sur un remorqueur, nous sommes
toujours à la merci d'une fausse manoeuvre. Par contre, faire s'effondrer le quai, c'est beaucoup plus rare!!
La tour prend garde? Non! Un bel emplacement, plus vulnérable que prévu...
C'est dire qu'il n'est pas souvent arrivé qu'un navire provoque l'effondrement d'un immeuble situé très près du bord d'un quai. Quant à
faire tomber la Tour de Contrôle d'un port, cela n'était à ma connaissance,
jamais arrivé. Généralement froisser la tôle ou endommager le quai, c'est le résultat d'un excès de vitesse volontaire ou non. En apprenant cela, je me suis dit:
-"
Ils n'y allait pas de main morte les gars..."
La
vitesse excessive en
marche arrière me paraissait donc plausible. D'autre part j'ai aussi soupçonné l'imprudence. Il faut faire
une Confiance aveugle à la Machine pour oser "culer" à 7 ou 8 noeuds dans un cul-de-sac! Comment tout cela a-t-il été possible?
Bougres de moules à gaufres! Naufrageurs!
La
presse spécialisée Maritime Italienne a fait son enquête et nous raconte plein de choses:
Citation de la Presse Maritime Italienne (le 12 Mai 2013)
Tragédie du Jolly Nero et du Môle Giano
La vitesse et l'état du navire dans le collimateur des enquêteurs
"Gênes - Le "Jolly Nero" allait trop vite le soir de la catastrophe du Môle Giano, c'est un élément qui est clairement démontré par les premières enquêtes techniques. Ceci apparaît crucial pour déterminer les causes de l'accident. Mais autre chose est étudiée par les enquêteurs. Sur la passerelle pendant une période de temps qui a dû être fatale, on a cru la Machine lancée "
en avant" et Antonio Anfossi le pilote s'est effectivement peu à peu interrogé, peut-être un peu trop tard car c'est arrivé vite:
-"
Je ne vois pas le sillage..."
-"
Il est en route!" (la machine) lui a-t-on répondu. En fait ce n'était pas le cas. Ce malentendu a rendu encore plus pertinentes les constatations lors de la première enquête menée par les experts du Procureur. Sur les "répétiteurs", dispositifs permettant à la passerelle de savoir ce qui se passe dans la salle des machines, ces instruments étaient tous en panne depuis des jours..."
Commentaire très personnel:
J'ai posé cette question en haut de cette page,
"qu’est-il donc
arrivé à la télécommande des MP pour qu’il devienne soudain
incontrôlable?" Avec tout ce qui se sait à présent en Italie, il semble que la réalité soit très simple, il n'y avait
plus de télécommande du tout depuis "
un certain temps", encore incertain...
;-)) "Tout ça fait désordre"!
Le Cul d'un autre PC "CONRO" de la Cie Linea Messina
"DEHALAGE à 3 mètres à la seconde (7 noeuds)? Voici la reconstruction de la route empruntée par le "Jolly Nero". La manoeuvre a commencé à
22h20, au Môle Nino Ronco. Le navire s'est déhalé en marche arrière en étant tenu par 2 remorqueurs, le "
Espagne" à l'arrière et le "
Genua" à l'avant. En 3 minutes, le Porte-conteneurs avait déjà atteint une vitesse de 2,8 noeuds
(1,44 m/seconde) et passait la Pointe Canepa, selon les relevés du système par satellites et du système AIS.
(système d'identification automatique par balise radar embarquée)
A
22h37 la vitesse était de 3,8 noeuds et selon des témoins, le "Jolly Nero" toujours en machine arrière, poursuivait ainsi sa route sur un mile et demi jusqu'au passage de Bettolo, avant de commencer la manoeuvre d'évitage afin de tourner la proue vers la sortie du port.
À
22h45 le cargo naviguait toujours à 3,3 nœuds mais sur la carte numérique examinée par les juges, deux points de données semblent proches et non distants de 3 minutes de route. La vitesse aurait augmenté de 3 nœuds à la hauteur du Pont Rubattino.
L'hypothèse des experts est que cette différence peut être due à l'arrêt des moteurs en vue de la tour de contrôle.
A
22h52 le navire est à nouveau à 3,3 noeuds et il a commencé son évitage.
Le «Jolly Nero» aurait alors dû ralentir, mais au lieu de cela à
22h59, il continuait à culer à 3 noeuds, 5 pieds/seconde. Il a alors fatalement heurté la Tour du Pilotage. Le capitaine Fabio Casarini du remorqueur "Espagne" interrogé, soutient que le navire marchait à 3,6 noeuds."
Manoeuvre du PC "CONRO" Jolly Rosso à Marseille avec deux remorqueurs
"
LA MACHINE EST REPARTIE": Fatal malentendu.
"En passerelle, 3 hommes clés sont considérés comme responsables d'homicides involontaires et multiples:
Le Cdt Roberto Paoloni et Raymond Romano, le Second Capitaine, plus Mr Anfossi Antonio, Pilote du port de Gênes. Leur porte-conteneurs faisait route en marche arrière pour effectuer sa manœuvre d'évitage et devait être au bon instant retenu dans son élan par la commande "
en avant", exécutée directement à partir de la salle de contrôle de la machine. C'est alors que quelque chose n'a pas fonctionné correctement:
Le Moteur Principal ne démarra pas, peut-être en raison de la défaillance d'une vanne pneumatique. Le Pilote s'est alors inquiété, en observant qu'il s'approchait toujours aussi vite des quais,:
-"
Je ne vois pas de brassage d'eau"
(de l'hélice!)
-"
La machine est lancée" ont affirmé le Cdt et le Snd. Il faut dire que les "répétiteurs" étaient Hors Service, il ne leur était donc pas possible d'être absolument sûrs de ce qui seraient fait de leur ordre, sans contacter verbalement la salle de contrôle de la Machine. La position de la Cie Armateur du navire, Linea Maritima Messina, est que ce défaut pouvait être contourné par le fait que les ordres à la machine ont été communiqués par talkie-walkie UHF. Ce n'est pas une pratique très courante..."
Très amusant en bande dessinée, un peu moins en réalité...
"Les enquêteurs pensent que ce moment crucial d'incertitude ne dura sans doute que quelques secondes et qu'à la vitesse alors mesurée, la moindre absence de communication pouvait faire la différence. Les conseillers techniques nommés par le Procureur en chef Michele Di Lecce et le substitut Walter Cotugno ont effectivement constaté que sur les consoles des commandes aux Machines en passerelle des navires du même type que le "Jolly Nero",
TOUS les répéteurs étaient "
dans le sac". Ce qui est arrivé à ce moment-là était donc une progression vers la tragédie. Le pilote donna un nouvel ordre:
-"
En avant demi"!
Du remorqueur "Espagne" est venu un ultime avertissement:
-"
Que faites-vous? Vous n'avez plus d'eau derrière!"
Le commandant observa alors le mouvement de son navire, se déplaçant dangereusement vers la tour de contrôle. Il n'a pas fait mouiller les deux ancres, mais donna l'ordre aux deux remorqueurs de "
Tirer au maximum". Mais à cet instant il était déjà trop tard. Quelques instants après, la tour fut touchée avec violence par le cul du navire et s'est donc effondrée."
L'escalier vers nulle part...
PRESSION du PROCUREUR:
"La version d'un autre homme qui pourrait être très importante pour confirmer tout ce qui s'est réellement passé dans ces moments dramatiques, est celle l'
Officier de service à la
manoeuvre arrière. Les enquêteurs l'ont interrogé très peu de temps après le crash du "Jolly Nero" contre le Môle Giano. Cet Officier a un rôle important dans l'affaire, car son rôle est aussi d'être vigilant sur la position et les mouvements de l'arrière du navire par rapport à son environnement, à commencer par l'observation de la distance avec le quai! Il doit aussi en informer régulièrement la passerelle durant le déroulement de la manoeuvre. A partir de sa "
position privilégiée", rien n'a pu lui échapper de toutes les étapes de ce qui est arrivé. Il était aussi bien placé pour voir et entendre, si oui ou non la machine a été relancée en avant. Pour cette raison, dans les prochains jours, il sera encore entendu par les enquêteurs du Port et de la Justice."
Le Port de Gênes vu la nuit
LA MACHINE ET LES COMMUNICATIONS PASSERELLE - SALLE DES MACHINES EN CAUSE
"Un défaut de lancement de la machine était déjà arrivé au moins une fois. Au PC de contrôle de Machine du "Jolly Nero," la nuit de l'accident qui a fait neuf victimes se trouvaient deux Officiers Mécaniciens de Service pour assurer la manoeuvre. Les deux Moteurs Principaux de Propulsion de ce navire sont d'un modèle ancien
Burmeister &
Wain, dont il se dit que c'est
(normalement) un équipement fiable.
D'autre part le commandant, lors de tous les essais habituels effectués avant l'appareillage, avait rassuré le Pilote:
-"
Tout est paré!" Affirma-t-il. Mais selon les investigations des enquêteurs il est survenu au moins un incident à une autre occasion, qui pourrait s'avérer très utile dans le cadre de l'enquête. Là aussi lors d'une autre manoeuvre portuaire comparable à celle de la nuit de la catastrophe du Môle Giano,
(même si cela fut cette fois sans conséquence grave) le moteur devant être lancé n'est pas parti."
Moteur lent Diesel Marin en cours de montage au Chantier
"Pendant ce temps les plongeurs ont pu récupérer plus de cinquante restes des divers appareils électroniques Radios, Radars et informatiques de la Tour de Contrôle détruite lors de l'impact. L'espoir existe de pouvoir utiliser des données intéressantes pour l'enquête. En particulier ont été retrouvés les supports de stockage où sont enregistrées en permanence les conversations entre la Capitainerie et tous les navires en manoeuvre. Tout cela est actuellement étudié et cette Mission est confiée aux ingénieurs et techniciens des compagnies constructeurs des équipements et aux spécialistes des logiciels utilisés, sous la supervision de la Marina Militare."
Le Jolly Rubino, un accident de mer plus ancien survenu à la Cie Linea Messina sur la Côte d'Afrique.
"La disponibilité des restes de ces équipements et les données qu'ils contiennent seront cruciales pour la poursuite de l'enquête, car elles permettraient aux juges de reconstituer exactement les communications entre les différents acteurs dans les étapes décisives qui ont précédé la collision. Les dialogues en effet ont été enregistrés par des militaires et ceux de la Capitainerie par le centre du pilotage, mais les ordinateurs et les équipements de radio stockés dans la structure effondrée, se sont retrouvés au fond du bassin. Une troisième copie des communications a été sauvé par le VDR
(Voyage Data Register analogue à la "boîte noire" des avions) du "Jolly Nero". Cependant de l'inquiétude demeure à propos de la manipulation de ce matériel, car il n'est pas encore certain que tous les enregistrements aient été assez bien préservés."
Passerelle du Batillus supertanker de Shell France en 1976
"D'autre part une avance significative de l'enquête pourrait venir du témoignage du Pilote Mr Antonio Anfossi, qui conseillait le commandant Roberto Paoloni du "Jolly Nero" pour la durée de la sortie du Port. Mr Anfossi, assisté par son avocat et celui de la guilde du pilotage portuaire Carlo Francesco Munari, a déclaré aux enquêteurs s'être rendu à bord dès 21h30 et le navire aurait largué ses amarres une heure plus tard. Le Pilote déclare aussi avoir demandé formellement au Cdt Paoloni (assisté par son avocat Mtre Raymond Romano ) s'il y avait des problèmes techniques à bord et la réponse aurait été négative:
-"
Tout est en ordre" disait-il...
En réalité tel n'était pas
(du tout) le cas et le Pilote se rendait peu à peu compte que la préparation de l'appareillage tardait. Les communications entre la Passerelle et le PC-Machines étaient difficiles car il existait un problème avec les transmetteurs d'ordres dont en plus aucun répétiteurs ne fonctionnaient:
En d'autres termes, les Officiers Mécaniciens de Service ne voyaient pas automatiquement si à la passerelle, le Pilotes et/ou le Cdt effectuait une demande d'ordre concernant la machine..."
Console des commandes de la Passerelle d'un Porte-Conteneurs de la CMA CGM
"Au-dela de ça, de nombreux équipements de la Console de Commandes Machines en Passerelle étaient défectueux, mais la communication avec la machine fonctionnait de vive voix par les UHF portatives (talkie-walkie) du bord. Cela dit par nature, ce mode de communication ne passe pas correctement partout à bord du navire. Mais il était possible d'utiliser le téléphone.
A tout cela il fallait ajouter le fait que le personnel de la machine était Russe*. De surcroît dans son rapport, le Pilote Mr Anfossi mentionne qu'une défaillance presque identique mais sans conséquence, avait déjà par le passé empêché ce navire de lancer son Moteur Principal en avant au cours d'un évitage dans ce même port de Gênes, ce fait remontant à plus de quatre ans.
Un dernier détail peu clair souligné par l'enquête, concerne les bouteilles d'air comprimé de lancement du MP. En effet, étaient-elles à un niveau suffisant pour pouvoir "assurer" durant tout le temps que durerait cette manoeuvre? La mesure de la pression affichée était-elle correcte? Quelle était l'indication des niveaux?
Compte tenu du non fonctionnement constaté de certains indicateurs en passerelle, ceci pourrait avoir trompé le Cdt et le Pilote sur la capacité réelle de leurs Machines à assurer normalement la manoeuvre. A toutes ces questions les Procureurs et Juges demanderont des réponses..."
PC (poste de contrôle) des Machines d'un Porte-Conteneurs de la CMA CGM
"Il a cependant déjà été constaté que
l'ensemble "
chadburn", les indicateurs de marche et de vitesse de rotation des Moteurs Principaux et
tous les transmetteurs d'ordres étaient Hors Service. La passerelle communiquait donc avec la machine par téléphone ou par des Talkie-walkie UFH, dont le fonctionnement est variable selon l'endroit d'utilisation.
Le Porte-Conteneurs Jolly Nero est propulsé par deux moteurs principaux type "
Burmeister &
Wain" à deux temps, certifiés par le RINA.
(Société de Classification Italienne de navires) Si leur maintenance est correctement assurée, ces moteurs peuvent fonctionner facilement plus de 40 ans. Ces moteurs ont naturellement été installés au Chantier Natal du Jolly Nero lors de sa construction en 1975, ils ont donc 38 ans."
Parquet à culasses du Moteur Principal du Porte-Conteneurs Zambèze (1971)
"Les neuf victimes de l'effondrement de la tour de Contrôle sont:
Les Capitaines du Port de Gênes et des Garde-côtes,
Francesco Cetrola Capitaine de 1 ère Classe et
Marco De Candussio Capitaine de 1 ère Classe.
David Morella Capitaine de 2ème Classe,
Joseph Tusa Capitaine de 3 ème Classe et la Garde-côte
Daniele Fratantonio.
Michele Robazza, Pilote de Port.
Puissance de Maurice Opérateur Radio des pilotes,
Sergio Basso Opérateur Radio du Port."
Ne les oublions pas!
Culasses du Moteur Principal d'un Porte-Conteneurs de la CMA CGM (années 2000)
"A l'heure du choc une quinzaine de personnes se trouvaient dans la Tour de Contrôle, c'était l'heure du changement de Service. Etaient présents à la cérémonie de leurs obsèques le Chef d'Etat-Major de la Marine, l'Amiral Giuseppe De Giorgi, le Général Cdt du Corps des capitaineries de port, l'Amiral David Cacioppo, le Préfet Maritime de Ligurie, (Région où est située GENES) l'Amiral Felicio Angrisano, le Président de l'autorité portuaire du port Ligure le Dr Louis Merlo, le Président de la Région de Ligurie, Claudio Burlando, le Président de la République Giorgio Napolitano, accompagné par d'autres hautes Personnalités de l'État. Dans le même temps les recherches se poursuivent pour le Garde-côte Gianni, dernier disparu du tragique accident."
Genova Italia Via Brigata Liguria
Pour information les Missions de la Capitainerie:
"C'est l'ensemble de toutes les fonctions des Officiers de Port et de la Garde Côtière. Ces Services portuaires effectuent des tâches dans de nombreux domaines tels que la Sécurité de la Navigation des Navires de Commerce et de Pêche, la Recherche et le Sauvetage, la Régulation du trafic portuaire et côtier, la Protection de l'Environnement Maritime, le suivi administratif de toutes ces activités. En Italie ceci représente environ 11000 hommes et femmes répartis sur plus de 300 sites militaires et civils sur le territoire."
"Pour les transports, les capitaineries de port et la Garde côtière sont par l'ampleur et la diversité de leurs tâches, un point de référence pour toutes les activités à compétence Maritime, véritable "guichet unique" pour les usagers de la mer.
Ces Autorités Portuaires dépendent du Ministère des Infrastructures et des Transports puis partagent leurs compétences avec d'autres Ministères pour certaines activités spécifiques."
Fin de citation
Qu'en pensent les Gens de Mers? (Ici ceux du super-tanker "Namur")
COMMENTAIRES "à chaud" de quelques NAVIGATEURS en activité ou en retraite:
("pêchés ça et là" sur des forums Maritimes de la "vaste toile")
"Pour avoir souvent participé à cette manœuvre à Gênes, je crois me souvenir que les remorqueurs restent attelés jusqu'à la fin de l’évitage et que le navire reprenne de l’ère en avant. et c’est vrai que c’est “sportif” comme évitage. Mais ce n’est pas pour autant que les remorqueurs auraient pu éviter l’accident car à la vitesse ou le navire semblait culer, il n’était pas possible de l’étaler rapidement sans le concours de sa machine et le remorqueur de l’arrière aurait du tirer en garde, au risque de cisailler sa remorque sur l’angle du tableau arrière et de la casser. Il n’aurait donc pas pu tirer bien fort!
De plus, même si les remorqueurs peuvent trouver la situation anormale, ils ne peuvent préjuger de ce qui se passe à bord du remorqué, tant que le pilote ne parle pas et ne donne pas d’ordre. Et tant que ce dernier espère que la machine va repartir, il ne dira rien et le temps passe...
C’est cependant de bonne guerre de la part de l’armateur d’essayer de faire porter le chapeau aux remorquage, c’est souvent comme ça après les avaries... ;-)) Mais pour ce cas, c’est loupé!"
Remorqueur du Havre Antifer
"Pour avoir N fréquenté Gênes et cette manoeuvre finalement très classique là-bas, nécessitant de la précision et de la sûreté, je confirme que les 2 remorqueurs restent généralement attelés jusqu'à la fin de l’évitage, puis on les largue dès que l'avant du navire "pointe" dans la bonne direction.
Ce n'est pas compliqué si tout va bien, si on ne va pas trop vite et si...
Tout est "ok" à la Machine!
La Cie ne pouvait pas cacher que l'entretien du navire laissait à désirer, car les enquêteurs sont fatalement montés à bord peu après la catastrophe, dès qu'il fut mis à quai. Un répéteur HS, ça peut toujours arriver, deux, hum-hum!... Mais bon, le navire est un peu ancien et faire réaliser "sur mesures" et sur commande certaines pièces, c'est parfois long. Cela peut donc se pardonner.
Mais quand ils sont
tous niqués depuis des semaines et que pour donner des ordres de manoeuvre à la Machine, on a pris l'habitude de les passer par téléphone ou avec les UHF portatives, pour moi ceci peut porter un nom: "
bateau bordèlique"!
Il y a toujours un moment dans la vie maritime, où le Cdt et le Chef Mécanicien ont
le Devoir (même s'il faut sans doute parfois savoir user de beaucoup de tact ;-)) annoncer à la Cie que le navire ne remplit plus les conditions de sécurité conformes aux "
règles de l'art" et nécessaires pour aller en haute mer, ni même pour manoeuvrer au port. Ce soir là, les officiers du Jolly Nero et le Pilote faisaient du trapèze sans filet. Qu'en dire de plus?"
-"
C'est consternant" disait R...
Ca oui!
Gênes vue aérienne du port
"A propos d'un récent article de l'hebdo "
le Marin", en effet il est fort de café de mettre tout sur le dos du "tonton". Assurer la fonction de Cdt à bord devient de plus en plus difficile. C'est aussi au niveau de l'Armement dans chaque Cie qu'il faut sévir. Il est trop souvent prouvé après enquête que de nombreux accidents sont le plus souvent dû à la surcharge de travail, au manque d'effectif, à l'excès de fatigue et à certaines économies de bout de chandelles parfaitement ridicules et souvent dangereuses. Ils n'ont qu'à embaucher."
Commentaire personnel: Leur réponse?
Navire du Futur en plastique et "télé-opéré"? (le 14 Mai 2013) On n'y est pas encore, mais "
ça craint"! Car c'est
techniquement possible depuis plus de 20 ans. Quelques "intéressants" essais Japonais furent réalisés à l'époque avec succès. Mais le coût et la fiabilité de la pratique d'un navire "télé-opéré" n'étaient pas maîtrisés. Maintenant c'est très certainement possible et je sens que la tentation d'essayer existe. Ceci ne soulèvera certainement pas un enthousiasme profond. ;-))
"
Les équipages sont devenus difficiles à trouver" nous dit-on. Taratata!
De qui ils se moquent? Si presque partout au Monde les gens veulent de moins en moins naviguer,
la faute à qui?" Ben ouhaich...
Note*: Les mécaniciens Russe à bord du Jolly Nero, est-ce que ceci leur facilite la vie à bord, la cohésion, l'efficacité et la sûreté des gestes, avec les cousins d'Italie? Je n'en suis pas sûr.
Les très grands navires sont les bienvenus à Rouen, mais c'est très délicat:
Ce vraquier Chinois long de 300 mètres est ici en cours d'évitage pour quitter Rouen
"Concrètement, à voir l'étroitesse du site de l'accident, il me semble qu'il n'y avait pas beaucoup de temps pour réagir. Les remorqueurs à pousser par derrière? Je ne vois pas bien. Le remorqueur de l'avant avait juste à tirer et n'aurait pas eu le temps de changer de place. Le commandant a mouillé les deux ancres paraît-il. Mais...
Il ne faut pas nous raconter des histoires! Le temps de filer 1/2 maillon de chaine et freiner le navire...
D'autre part, la construction de la tour semblait bien légère et le navire semble très peu endommagé. Le choc a été très violent, la vidéo surveillance le montre fort bien. D'un simple point de vue de la manoeuvre, il semble aussi y avoir eu un manque de réactivité de la part des remorqueurs. Mais ce n'est qu'une hypothèse de quidam n'étant pas à bord, j'écris çà d'après ce que je lis et ce que j'imagine de l'évènement.
On en saura plus, plus tard. Mais une autre question se pose. Pourquoi à Gênes, avoir construit la tour de contrôle si proche du bord du quai et semble-t-il, sans protection?"
Voyez les Artistes au Travail "saisis" par un hélicoptère:
Le Cdt et les Pilotes de la Seine et le plus grand des visiteurs de Rouen
"J'ai vécu ce genre de cas une fois à Lagos sur un Porte-Conteneurs quand je naviguais chez Delmas-Vieljeux. Ils nous avaient attribué deux remorqueurs visiblement très insuffisants, surtout celui de l'arrière. A un moment, alors qu il y avait beaucoup de courant, l'arrière se rapprochait de plus en plus dangereusement du quai, qui de surcroît était noir de monde. (
noir, à Lagos c'est prévisible! ;-)) Ces gens n'avaient visiblement aucune conscience du danger encouru si jamais nous "devions" heurter le quai. Qu'il s'effondre à la suite d'un choc trop violent est toujours possible. Aucune de ces personnes ne s'écarta du bord...
Sûrement sans même demander leur avis aux deux pilotes Nigerians qui "ronflaient" à la passerelle,
(car c'est aussi cela, Lagos) le commandant nous a ordonné de larguer le remorqueur
(où j'étais lieutenant à "la manoeuvre avant") puis demanda à celui-ci d'aller en pousseur sur l'arrière, ce qu'il fit. Ceci nous a sans doute "
sauvé la mise". Mais bon... Nous avions plus de temps et plus d'espace disponible que le Jolly Nero! Il suffit de regarder une carte ou une vue de ce port par Google Earth."
Le Havre
Qu'en pensent les Gens de Mer du Service Portuaire?
"Après ce tragique accident, on peut se poser une question.
Comment un navire peut-il aller frapper une structure fixe d'un port, qui plus est la tour de vigie et de régulation? Il
"faut" pour qu'un tel accident puisse arriver, que l'implantation de
celle ci soit vraiment très proche du bord à quai, à moins de 15 mètres
par exemple. Les cartes et photos locales du port de Gênes nous montrent une implantation de la tour "
au raz du quai".
On pouvait même plonger d'une fenêtre sans risque! Certes, la visibilité est excellente sur l'entrée du port et tous les mouvements de navires, mais le risque était prévisible.
Le Cdt se fait toujours assister par un ou des pilotes locaux
Tous les ports du Monde ont connus des accrochages ou des chocs entre navires et des engins de manutention. Pour ma part à Fos, j'en ai connu quatre et je sais qu'au Havre aussi c'est encore arrivé il y a d'ailleurs quelques mois. Ce type d'accidents à la gravité variable est relativement courant même si cela n'arrive pas tous les jours. Et il faut bien convenir qu'une grue sur rails ou un portique à conteneurs ne peuvent pas être installés à 50 mètres du bord à quai...
Les causes sont multiples, mais le plus souvent se sont des conditions de météo extrêmes. Parfois cependant, c'est beaucoup plus rare, la cause est une fausse manoeuvre ou une vitesse excessive, ou bien un "blackout" de la Machine, incident imprévisible toujours possible, même avec "
un navire bien tenu".
La Tour de Contrôle du Havre
A Gênes la construction de la Tour était à l'évidence audacieuse. En cas de choc avec un navire, l'édifice n'avait aucune chance et c'est terrible.
Nous devons penser à ces hommes et femmes présents dans la tour pour faire leur Métier, qui ne rentrerons pas chez eux ce soir, saisis dans l'exercice de leurs fonctions, peut-être sans même avoir eu le temps de comprendre ce qui leur est arrivé."
"Evidemment, je suis très "touchée" par l'accident. Comment un navire peut-il percuter une vigie? C'est invraisemblable! Mais en voyant les photos "avant", on comprend bien et franchement, aujourd'hui je ne serais pas rassurée de travailler dans une telle tour!" (Gwenaelle travaille à la tour de contrôle du Port Autonome du Havre)
Elle est au Havre! Donc elle sait mieux que moi ce que j'ai écrit. Leur tour est aussi stratégiquement située, mais pas aussi près du bord du quai. Si les navires passent souvent non loin "
en allant ou venant" vers les jetées, c'est sans devoir "
faire des pas de danse" près de la tour, comme c'était à Gênes. Je la comprends, quand ils ont su ça, ils ont dû être incités à "
examiner le site" de leur tour! Il y a là de quoi se poser des petites questions.
Calais
"Moi aussi ça m'a effrayé car j'ai bossé à la tour de Calais heureusement placée "en retrait" du bord du quai. Cela dit un choc violent "trop bien positionné" (si j'ose dire) peut sans doute lui faire du mal, mais sans la faire tomber à priori. La tour Génoise était placée (voir un plan du port) là où c'était le mieux situé pour avoir une vue totale sur tout le port, c'est la mission des officiers de port. Et la "géographie" de Gênes permettait d'abord cet endroit, il faut bien le dire. Tout au plus on peut dire que la tour était sans doute trop près du bord du quai mais...
Qui aurait supposé un coup aussi violent donné par un navire lancé en marche arrière? On était là dans l'improbable. Pour preuve, c'est bien la première fois qu'un truc pareil arrive."
Voyez le travail de l'hélice
Commentaire personnel: Ne les oublions pas! C'est le but de cette page. Durant quelques mois j'ai été Officier de Port à Calais, j'avais tendance à penser que le danger de notre fonction se situait surtout en faisant notre ronde régulière en voiture sur les quais. Pas seulement! Mais c'est vrai, la Tour de Contrôle de Calais est à l'évidence mieux placée que celle de Gênes le fut. Peut-être un choc violent
(toujours possible avec les car-ferries) sur le plus proche des postes à quai pourrait-il la "secouer" durement.
Cela dit, je ne pense pas qu'elle s'effondrerait comme un château de cartes! Où que ceci puisse arriver, ne les oublions pas. N'oublions pas
(encore moins!) les
Lamaneurs, les "
Matelots des Quais" en charge de l'amarrage des navires à toutes les heures des jours et des nuits. Un terminal à conteneurs ne s'arrête jamais!
En 2013 amarrer un navire se fait encore comme sous François 1er, avec des aussières. Même si on est aidé par des puissants treuils!
Les lamaneurs ont un boulot qui peut sembler privilégié à premières vue, car ce sont des
Marins Sédentaires. Ils sont aussi
les plus inconnus du "grand public". Quiconque les a souvent observés le sait, c'est une des fonctions les plus dures du "Grand Métier". Il est souvent
très dangereux de travailler avec certains navires "
mal tenus".
Les équipes de maneuvre avant et arrière travaillent avec les lamaneurs locaux
